• Je me souviens... - Bernadette - 19/02/2015

    CHEWING-GUM

     

    Les angoisses et les frayeurs de la Libération estompées, les villageois se pressaient sur les bords de la route nationale pour acclamer les Alliés. Juchés sur leurs camions G.M.C. ceux-ci répondaient à la foule par des gestes joyeux et des jets de friandises. Quelle aubaine, lorsque nous les enfants, nous pouvions attraper, jetées çà et là, quelques-unes de ces gâteries dont nous étions privés depuis longtemps ; biscuits, chocolats étaient les bienvenus.

    Une gourmandise à laquelle je n’avais jamais gouté s’offrait enfin à moi ; j’en avais tellement entendu parler : «le chewing-gum» ; quelle aventure ! Comment fallait-il s’y prendre pour déguster cette sorte de bonbon sans s’étouffer ? Que de choses étaient dites à son sujet : il ne fallait surtout pas l’avaler, sous peine d’un collage intestinal ou d’obstruction œsophagienne. Tout cela faisait un peu peur et les jeunes enfants n’avaient pas le droit d’y toucher.

    Cependant, je me lançais. Après avoir retiré le double papier qui l’enveloppait, je mettais dans ma bouche cette fine languette qui deviendrait une gomme collante. Certains enfants en mâchaient deux à la fois ; j’ai bientôt compris pourquoi. Avec cette espèce de pâte molle on pouvait faire des bulles qui claquaient pour ceux qui savaient pratiquer habillement cette mastication.

    Il ne fallait surtout pas s’y amuser devant les parents qui trouvaient cela dégoutant. Ils ne voyaient pas d’un bon œil cette friandise qu’il fallait déguster sans ouvrir la bouche et dans des endroits propices sans gêner qui que ce soit. Comment comprendre les soldats qui en mâchonnaient continuellement ?

                Devenue adepte du chewing-gum auquel j’avais pris goût, un an plus tard en colonie de vacances, une fille qui semblait avoir déjà expérimenté ce genre de transformation, nous a suggéré de « mastiquer » quelques grains de blés extraits des épis retirés à même la meule, jusqu’à la disparition totale de l’enveloppe pour en extraire une pâte qu’on ne pouvait qualifier de savoureuse, mais totalement insipide. Satisfaction d’adolescents.

     

    Bernadette - 19 février 2015


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