• Vies ordinaires

    VIES ORDINAIRES

     

    Emmanuel BOVE

    Henri CALET  « La belle lurette »

    Pierre MICHON « Vies minuscules »

     

     

                                                                 MA GRAND MERE

     

     

    Anna, ma grand mère, a perdu sa mère alors qu’elle était toute petite.

     

    Placée chez les Sœurs, elle me racontait les matins froids dans le dortoir : les « grandes » avaient le devoir d’aider les « petites » comme elle, à sortir les vêtements de dessous les couvertures et à s’habiller.

     

    Jeune fille, elle apprend la couture comme la plupart de ses amies.

    Sa carte d’identité porte la mention « tailleuse » sur la ligne : profession.

     

    Adulte, elle se marie avec Boyer  ( étant l’aîné, on ne l’appelait pas par son prénom,

     François mais par son nom de famille.)

    Elève aux Beaux-Arts, il devient peintre décorateur, peintre en bâtiment, peintre en lettres.

    Ils ont deux fils : Louis et Hyppolite.

    Hyppolite est « attardé » comme on disait. Il ne saura jamais lire ni écrire. Il travaillera avec son père et son frère. Il mourra avant elle, comme elle l’avait souhaité « m’occuper de lui jusqu’au bout »

    C’est une vie de dévouement permanent.

    Son père et sa sœur qui mourra « poitrinaire » ( tuberculeuse) vivent  avec elle.

    Plus tard ce sera son beau-frère et ses trois enfants qu’elle accueillera après la mort de leur maman.

    Plus tard,encore, c’est un couple de « novis » amis, qui s’installeront  dans l’appartement  laissé vide.

    Ils entreront véritablement dans la famille tant l’intimité deviendra profonde.

     

    « La maison d’Anna, c’est le réfugium peccatorum » disent les voisins !

     

    Elle accueille, elle aide : couture, cuisine….

    A part les commissions qu’elle va faire chez Nini Paul, avec son sac en toile cirée qui traîne presque par terre, elle passe de longues heures à sa machine à coudre.

     

    Le dimanche, c’est souvent Eoures où son beau-frère s’occupe du Cercle du village et où il a besoin d’aide (encore !) pour les repas,  les Pastorales, les concerts de l’orchestre amateur  où mon père joue du cornet à pistons.

     

    J’aimais, le soir, sur ses genoux, avant qu’on mette de la lumière, l’entendre chanter « Connais-tu le pays… » et d’autres airs d’opéra que mon père répétait.


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