•        Café,toasts, fruit, nous prenons notre petit déjeuner dans un bar de la 42ème rue à New York. Arrivées, mes amies et moi deux jours plus tôt, nous sommes excitées et perplexes sur notre emploi du temps. Nous ne voulons rien rater ! Ce matin-là on élabore les projets de la journée, on hésite sur l'ordre des visites des différents musées au programme. La discussion va bon train, les guides touristiques étalés sur la table, chacune convoquant l'attention des autres sur le choix et le commentaire des" visites obligées" des "sites incontournables".

            Nous rassemblons nos affaires éparses, c'est décidé, nous commencerons par le Guggenheim. Je me lève aussitôt, empoigne ma veste, empressée, je tente de saisir mon sac suspendu au dossier de la chaise... Il n'est plus là ! Vite un coup d'oeil sous la table, sur le sol, panique : papiers, passeport, billets envolés ! Prise de vertige, je chancelle, désemparée. Cette ville gigantesque me fait soudain peur, cette ville où tout peut arriver ! Je m'écroule sur mon siège, lasse, déçue, impuissante. Puis dans un sursaut d'enthousiasme, je me ressaisis. "Je vais faire un déclaration de perte au commissariat à coté et je vous rejoins au musée".

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  • Vent qui rage, saccage, ravage

    Qui roule, riboule, chamboule, tourneboule

    Qui saoule

    Souffle qui souffre, siffle, affole, affriole

    Bizare blizard de hasard

    Mais brise soumise, exquise

    Qui maraude, fait la finaude

    Vent qui rit

    J'ai fini


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  • La Colline

     

    Entrons dans la clairière embaumée de bruyère, de thym, de romarin. Délaissons le sentier de Grande Randonnée,  balisé, ordonné, préférons-lui la sente qui dévalant la pente,  nous conduit au vallon envahi de buissons. Quelques asphodèles, frêles, cherchent le soleil pour sortir du sommeil.

    D’un éboulis, presque tarie, la source projette par saccades une faible cascade, fraîche sous la brèche,  d’où jaillit l’eau où boivent les perdreaux.  Les lièvres,  les lapins, dansent dans les lupins, en fuyant les chasseurs en sueur,  fourbus après la battue.

    Fuyons les sangliers, admirons l’églantier. Remontons le talus, herbu, où les pâquerettes offrent leurs  collerettes. Découvrons au passage, les tulipes sauvages, les jacinthes et les térébinthes. Là c’est une restanque abritant l’aphyllanthe et le petit grillon dernier de la saison.

    Voici le cabanon laissé à l’abandon. Posons nos sacs à côté des sumacs ; sous les chênes-verts,  installons nos  affaires ; nous allons déjeuner au milieu des genêts.

    A cause du mistral, pas génial, suivons la piste bordée de cystes et de pins dont les vieux troncs cachent les champignons. Le sommet dévoilé,  laisse deviner qu’il faut encore grimper, transpirer.

    A l’abri du vent violent, la dernière cigale, maussade, émet quelques sons en guise de chanson.

    Pour finir cette amicale ballade, passons sous la futaie pour cueillir quelques baies, évitons le rocher surplombant le fossé. Dégustons les arbouses qui tombent sur la mousse. Malgré nos courbatures, ramassons quelques mûres.

    Ce soir, à la veillée, quelle belle journée, nous pourrons raconter.

     

    Bernadette  -  23 janvier 2014

     


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  •  Quittons la rue Jean Jaurès

    avec allégresse!

    C'est une promenade

    une simple balade

    sans troubadours ni ballades.

    C'est un itinéraire

    solitaire

    Rencontre avec la mère-terre vers la montagne

    Pic de Bertagne : un rituel habituel.

    Marcher dans les rochers, sur les graviers de janvier

    et non sous le soleil comme la pauvre Mireille.

    C'est le départ avec retard.

    Il y aura un arrêt dans la forêt.

    Quoi! des volailles dans les broussailles ?

    Et cette pente qui serpente dans la descente...

    Il serait vain, dans ce ravin, de chercher son chemin.

    J'erre, dans les pierres, misère!

    Ah! c'est le bois! joie! Nous y voilà!

     


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  • Fragments hopperiens - GasEd a raccroché le tuyau sur le côté de la pompe alors que la voiture avait déjà disparu dans le virage. À présent il ne passera sans doute plus personne. Ed va rentrer au bureau, il écoutera la radio en buvant des bières.

     

     

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  • Matin à Cape CodDétails

    Une maison isolée, détachée du monde extérieur, non loin d’une forêt austère.

    Qui est vraiment cette femme sans âge, debout,  les bras nus, enveloppée de la lumière du jour naissant, devant une fenêtre ouverte ?

    Elle  paraît inquiète ; visiblement, elle attend quelqu’un.

    A-t-elle aperçu une silhouette dans le lointain ? L’impatience se lit sur son visage, est-ce de l’angoisse ou de la peur ?

    Pourquoi cette attitude ? Va-t-elle poursuivre son attente ?   Va-t-elle rester ?  Va-t-elle partir ?

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  • HOPPER  détails

    Après le bain, tous les matins, Jo: maillot de bain ; Ed : torse nu, s'assoient sur ce banc en bois, sur la terrasse en planches, contre la façade chauffée par le soleil de midi.

    Devant eux : le sable, les rochers, la mer.

    bio

    Chaque été, ils avaient l'habitude de venir dans cette petite maison prêtée par un ami.

    Sur la plage, c'était le repos, le délassement, après des semaines d'activités, de soucis, de surmenage.

    Cela a duré des années ; mais, un jour, la maison s'est vendue ; l'ami est parti. 

    poème

    lumière éclatant sur la façade de midi

    serviettes claquant au vent comme des voiles

    barque amarrée

                mais la chaîne se rompra

                et on partira

    lettre

           cher Laurent,

    Un ami nous a prêté une petite maison sur la plage.

    Ici : pas de voitures ; pas de voisin ; pas d'arbres.

    Le ciel, le sable, l'eau.

    Viens nous rejoindre.

    Tu seras bien dans ce coin solitaire : il y a une minuscule maison pour toi, pas loin de la nôtre.

    Tu seras bien pour écrire et te reposer.

     

     


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  • Tatie

    Baptitstine est frisée comme un mouton. Non, c’est pas vrai, ça c’est ce qu’on lui chante, sur un air de Maurice Chevalier. Mais elle est bien bouclée, des cheveux très blancs, parfois un peu jaunes quand elle n’a pas eu le temps ou l’argent pour s’en occuper.
    Elle est vieille depuis que je la connais, depuis toujours. Plus vieille que tous les autres, les grands-pères, les grands-mères, les grands oncles et compagnie.
    Toute de noir vêtue, longues jupes, chemisiers et cardigans, petite veste serrée à la taille qu’elle a très fine, chaussures simples à gros talons. Elle trottine à petits pas, serrant son sac sous son bras, les boucles abritées sous le petit chapeau noir à voilette dans lequel est plantée une grosse aiguille terminée par une perle grise.
    « Tatie va venir » dit mon père pour nous faire tenir tranquilles. Elle s’installe dans un coin, déballe ses maigres affaires. Je me pose des questions sur la petite bouteille dont elle boit une gorgée tous les matins. Je ne sais pas ce que c’est mais à la grimace de ma mère j’imagine le pire.
    Un été, voilà qu’elle décide de nous accompagner à la mer. Elle nous fait sortir la singer sur la terrasse et se coud un maillot de bain. Deux pièces, s’il-vous-plaît. Peut-être n’avait-elle pas assez de tissu pour n’en faire qu’une...
    Ça c’est de l’arrière grand-mère !

    *
    * *


    Le petit

    Ils sont beaucoup braves, ces petits, ça me fait toujours bien plaisir de les voir quand ils viennent en vacances. J’ai pris tout mon barda, oh, ça tient dans mon cabas, je vais guère déranger.
    Le petit dernier me regarde m’installer : la chemise de nuit au pied du lit, l’étui à lunettes sur la table de nuit, avec les cachets et l’huile de ricin. Le matin, il me regarde bizarrement quand j’en avale une gorgée. J’ai voulu lui en donner une gorgée, que ça lui aurait fait du bien, mais sa mère n’a pas voulu. Elle est plutôt pour les remèdes modernes mais elle sait pas ce qu’elle perd. Moi, si j’ai toujours bon pied bon œil, c’est bien parce que je bois ça. Même le goût je m’y suis habituée.
    Eux, pour sûr, ils préfèrent quand je leur fais la bourride. C’est ma spécialité et je me régale de voir ces minot s’en lécher les doigts.
    Cette année, j’ai envie d’aller à la mer avec eux. J’ai trouvé un morceau de tissu en bas de l’armoire, je vais me faire un joli maillot. Si c’était mon dernier bain, autant être présentable !


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  • L'oncle

    Je suis content d'avoir une nièce : j'en ai qu'une.Thalie et moi, on n'a pas d'enfant.

    Nous habitons sur la Route Nationale. Ma soeur Victoria,son mari Louis et leur fille Josette habitent sur la Route, aussi, un peu plus haut, au bout du village.

    De temps en temps, Josette vient dîner à la maison : elle dit que c'est bon ce que tante Thalie cuisine.

    Et puis, surtout, elle aime regarder sa tante repasser. Thalie tient le magasin Fraissinet et il y a toujours du linge qui attend et Josette dit que ça sent bon.

    Le dimanche et l'été, on va au cabanon, à Gèmenos. Nos deux cabanons sont proches l'un de l'autre, dans le vallon de Routelle.

    On passe de bons moments. La petite, avec son vélo, va d'un cabanon à l'autre.

    On vit, aussi, des moments difficiles : le temps de la guerre et des restrictions. Alors, quand je peux avoir des pâtes à l'usine Rivoire et Carret où je travaille, je prends ma corne ! et je souffle ! Le son arrive jusqu'au bas du vallon et Josette crie :

    - C'est Tonton qui appelle ! On va aller chez lui manger la macaronade ; on va se régaler !

     

     

    La nièce

    Il se penche sur moi ; je suis assise dans mon landau ( oui, oui, je suis sûre de ce souvenir tellement ancien) Il replie la capote pour mieux me voir : il me fait peur.

            Plus tard, je le revois, assis près de mes parents, autour de la table sur laquelle est posé un sac en tissu. L'oncle y plonge la main et ses doigts, en remuant,font tinter les petits objets qu'il contient.

            J'entends des phrases :

    - Les bijoux de Tante : on va se les partager.

    Sa voix est plus forte, plus autoritaire que celle de mon père qui dit :

    - Non,il y a avec nous, tante Florie.

    Et j'ai peur.

            A un repas de famille, le jour de ma Communion, il proclame :

    - Tout ce que j'ai sera pour ma nièce.

    Je ne comprends pas très bien.

    J'ai peur ; il a beaucoup bu.

            Je tape timidement à la porte de son appartement. C'est le jour de la St Valentin. Ma mère m'a mis dans les mains le bouquet violette-mimosa que, chaque année, rituellement, on apportait à Tonton. Cette année, je suis seule : il faut y aller.

     J'ai peur.


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  • La fille

    C’est samedi. Un samedi de juillet où il fait particulièrement chaud. Papa achève sa semaine de travail. Cet après-midi, il m’emmène à la plage ; il me l’a promis ; papa tient toujours ses promesses. Il a même décidé de m’apprendre à nager, j’ai un peu peur, mais il est si patient, si calme.

    Je suis prête, je ne veux pas retarder notre départ. J’ai mis une robe légère, retenu mes cheveux avec un ruban. L’impatience me pousse devant la porte d’entrée de notre maison ; je le guette ; et si le tram avait du retard ? Soudain, sa grande silhouette m’apparaît, je vais au-devant de lui en courant ; en me voyant il presse le pas.

    Il a dénoué sa cravate, retiré sa veste qu’il porte sur son bras ; il essuie la sueur qui coule sur son front. Va-t-il avoir le courage de renoncer à son après-midi de détente pour me faire plaisir ? Mais il se veut rassurant, m’embrasse et dit « le temps est beau, il n’y a pas de vent, quel bel après-midi nous allons passer » !

    Après le repas pris à la hâte, il boit son café sans perdre de temps, s’inquiète de savoir si j’ai préparé notre sac de plage, maillots, serviettes et surtout si je n’ai pas oublié le goûter.

    Il est aussi heureux que moi. Je découvre avec bonheur un papa disponible, acceptant de laisser maman qui ne peut nous accompagner.

    Nous voilà partis, pareils à deux écoliers qui se retrouvent pour une escapade.

    *

    Le père

    Ma semaine de travail est terminée.

    A la descente du tram, je presse le pas. J’ai hâte de retrouver ma fille qui m’attend à la maison et qui doit être impatiente. Je lui ai fait une promesse, l’emmener à la plage ; je dois même lui apprendre à nager. Je la sais peureuse, mais elle a tellement confiance en moi.

    Je dénoue ma cravate, retire ma veste, essuie mon front transpirant, il fait si chaud. Je suis sûr qu’elle se tient sur le pas de la porte d’entrée, guettant mon arrivée. Elle doit craindre un contre temps toujours possible qui dérangerait notre programme.

    Soudain, je l’aperçois, elle vient m’accueillir en courant dans sa jolie robe verte, ses cheveux retenus par un ruban. Elle est tout sourire. Elle se jette à mon cou, m’embrasse, semble lire sur mon visage quelques signes de fatigue, je la rassure, lui dit que le temps est parfait pour notre promenade et que cette balade me fera le plus grand bien.

    Je lis dans ses yeux une joie immense. Elle a tout préparé afin de ne pas retarder notre départ. Sa satisfaction se lit sur son visage. Elle est sûre désormais que ma promesse sera tenue !

    Nous voici partis, complices, pour un après-midi de vrai bonheur.

     

    Bernadette


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  • -       Bien le bonjour, dame fourmi ! Toujours à l’ouvrage ? Que ne prenez-vous donc un peu de bon temps. L’hiver est encore loin.

    -       L’été est si court, dame cigale, les provisions sont si vite épuisées. Et vous, quand songerez-vous à préparer la mauvaise saison ? Vos chansons débonnaires ne vous nourriront pas la froidure venue.

    -       Si je chante sans arrêt c’est pour charmer les hôtes de la forêt, stimuler les travailleurs. Mais croyez-vous qu’il soit nécessaire d’amasser autant de victuailles, de soulever, traîner ces fardeaux plus gros que vous ?

    -       Ah ! Ah ! Je vais bien rire, le froid venu. Aurez-vous l’audace de venir me solliciter afin de goûter à mes repas délectables ?

    -       Peut-être ! Vous si travailleuse, vous serez charitable, vous n’abandonnerez pas celle qui vous a charmé tout l’été. Songez que je suis restée enterrée quatre longues années avant de faire entendre mon chant. Il faut que je garde la forme pour pouvoir vous distraire l’été prochain.

    Bernadette


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  • Le soleil sèche mes ailes encore humides. C’est que j’en ai mis du temps pour arriver sur cet arbre. Mon chant s’amplifie et couvre la forêt. Quel bel été je vais passer sur le résineux où j’ai élu domicile.

    Du haut de mon habitat, je ne puis m’empêcher de sourire en voyant la fourmi s’activer, transpirer, tirer, pousser toutes sortes de victuailles pour préparer l‘hiver. Pourquoi s’acharner ainsi sans prendre un peu de bon temps ?

    Moi, je préfère chanter, profiter des beaux jours. Lorsque vendra le froid, j’irai la visiter pour quémander un peu de nourriture. Elle, si besogneuse, se montrera charitable envers moi et ne pourra me refuser son aide. Je la flatterai, lui disant mon admiration pour son courage et que c’est pour elle spécialement que j’ai tant chanté.

    Et si elle ne m’écoutait pas ? Si son cœur demeurait sec ? Je serais donc contrainte à me laisser mourir ? C’est impossible, cela ne se peut pas. Cependant, je préfère ne pas y songer et continuer à chanter.

    Bernadette


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  • Sous un soleil de plomb, lors d’une promenade en forêt, il s’approche d’un pin, à pas feutrés, pour observer cette chanteuse aux ailes translucides qui cymbalise à qui mieux mieux. Jamais essoufflée, cette cigale ne s’arrêtera donc jamais, pense-t-il ? Pourquoi ne songe-t-elle pas à emmagasiner quelques nourritures en vue de la mauvaise saison ? On la sait insouciante, mais tout de même.

    Au pied du résineux, il découvre la fourmi. Il suit sa progression, elle s’affaire, amasse mille et une choses souvent plus grosses qu’elle ! La fourmilière est en pleine effervescence.

    Dans son imagination, il continue à observer la chanteuse ; lorsque l’hiver venu, transie, suppliante, elle se présente chez la fourmi espérant lui soutirer quelques brindilles pour se sustenter. Mais la travailleuse acharnée ne s’en laisse pas conter ; a-t-elle tant travaillé pour nourrir la paresseuse ?

    Elle lui conseille vivement, telle une danseuse dans sa robe de bal, de s’enrouler dans une feuille morte et de réchauffer son corps dans une danse frénétique.

    Que va devenir cette pauvre diva ?

    Bernadette


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  • - Vous m'avez invité, M. Fabre, pour cette promenade en pinède et je vous en remercie.

    - Oui ; vous devez vous demander, monsieur le maître d'école, pourquoi se promener en cette saison froide ?

    - C'est vrai : on ne voit plus beaucoup d'insectes, monsieur l'entomologiste, ; on n'entend plus chanter ni les oiseaux, ni les cigales;les fourmis, seules, s'activent toujours.

    - Les cigales et les fourmis,  justement. Vous avez du faire apprendre à vos élèves la fable de La cigale et la fourmi. 

    - Oui, bien sûr. Ils la savent tous par coeur.

    - Et ils croient tous que les cigales se nourrissent de vermisseaux ?

    -... Euh! non, peut-être

    - Alors, après la récitation, faites donc une leçon de sciences et montrez-leur comment la cigale, avec sa trompe, son suçoir, pompe la sève du platane qui est dans la cour de l'école


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  • Allez, encore ce gros vermisseau et ce tas de graines que les copines ont préparé et j'arrête; 

    Une belle provision pour cet hiver.

    Tout le monde ne fait pas comme nous, les fourmis ; il y en a qui chantent, au temps chaud, pendant que nous travaillons. De les entendre, ça nous rend toutes joyeuses : on n'a plus d'ennui au coeur, plus d'embrouille en tête.

    Qui sait ce qu'elle fait, la cigale, ma voisine :

    -Eh! voisine, vous ne chantez plus ?...Et rien dans votre garde-manger ? Peuchère, je vous apporte des graines et des vers

    -Oh! vous, alors, vous êtes la fourmi prêteuse ? Je vous rendrai tout à la saison prochaine.

    -Mais non. Mais non, plutôt ; pour me faire plaisir : dansez maintenant.


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  • J'étais en train de traîner un énorme grain de blé vers la fourmilière ; je tirais, je suais,...quand j'entendis une petite voix chantante que je reconnus aussitôt : celle de la cigale, ma voisine.

    - Pourriez-vous me prêter quelques graines ; je meurs de faim ; je vous les rendrai à la moisson prochaine, en nombre plus important, même.

    Je m'arrêtais dans mon travail ; j'essuyais mon  front trempé de sueur.

    - Ah! vous croyez ? Et comment vous les gagnerez ces graines ? Vous n'avez jamais été capable de travailler quinze jours d'affilée ; vous aviez toujours "un concert à préparer". Je travaille toute l'année, moi. Et vous, vous nous avez cassé les oreilles avec vos cymbalettes; Tout l'été, vous avez chanté ? Et bien dansez, maintenant.

    Et je me remis à transporter mon grain


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  • Fourmi travailleuseTravailleuses, travailleurs,

    Allons-nous supporter plus longtemps de nous laisser manger la laine sur le dos ? Depuis toujours nous ne faisons que travailler, amasser des graines dans nos fourmilières que nous devons construire de nos propres pattes, et depuis toujours nous sommes victimes des prédateurs qui viennent jusque dans nos galeries pour se servir effrontément. Aujourd’hui ce sont les cigales qui s’en prennent à nous. Quand il s’agissait de prendre du bon temps l’été dernier, elles ne sont pas venues nous inviter, mais à présent que la situation a changé, elles nous appellent au sacrifice, aux efforts partagés, à la solidarité. Il est temps de dire Non ! À bas les profiteurs ! Grève générale ! Grève générale !

    Jean-Paul


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  • Oh l’autre, elle m’a bien regardée ? Qu’est-ce qu’elle s’imagine ? Que je me suis levé l’âme pendant des mois pour remplir mon garde-manger pendant qu’elle se payait du bon temps, et maintenant elle va arriver, faire deux ronds-de-jambes et se taper la cloche aux frais de Mimi ? Elle rigole ou quoi ? Ah, je l’ai vue venir de loin ! À la première feuille tombée, la voilà qui se pointe, tout sourire, et bonjour Madame la fourmi, comment ça va ce matin, et est-ce que par un effet de votre grande bonté vous pourriez envisager de bien vouloir me prêter quelques grains, histoire de passer l’hiver ? Pas de souci, je vous rembourserai tout ça rubis sur l’ongle aux premiers beaux jours, et patin et couffin...

    Ah c’est qu’elle s’est fait recevoir ! Y a pas marqué Supérette sur mon front, c’est pas les Restos du Cœur ici ! Tu t’es bien amusée cet été ? Eh bien maintenant tu te grattes !

    Jean-Paul


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  •             Madame,

     

    Veuillez m'excuser de vous appeler ainsi. Bien que sans animosité contre vous, je ne pourrai jamais vous appeler autrement, car les liens qui nous ont unies pendant les quelques mois qui ont précédé ma naissance ont aussitôt été retissés avec des parents que je considérerai toujours comme les seuls et uniques. Pendant plus de vingt ans j'ignorais d'ailleurs votre existence. Ce n'est que peu de temps avant son décès que maman m'a appris qu'elle ne m'avait pas mise au monde, mais que papa m'a trouvée un matin en ouvrant les portes de la Maison des Syndicats, dont il était alors le gardien.

    Merci de ne pas avoir cherché à me garder sans en avoir envie, et de m'avoir déposée là plutôt que sur les marches de l'église d'en face, permettant ainsi à ces braves gens de m'élever dans l'amour des hommes et de la vie plutôt que dans celui de dieux mortifères.

    Si j'ai pu vous retrouver, c'est grâce au petit mot que vous aviez épinglé à mes langes, dans lequel vous indiquiez que je m'appelais Liberté et que vous souhaitiez que ma vie soit à l'image de ce prénom. Un prénom assez peu courant pour que je me reconnaisse dans l'héroïne de l'un de vos romans. J'ai également pu lire entre vos lignes un profond humanisme et le regret de ne pas avoir eu d'enfant ultérieurement. Lors d'une séance de dédicaces, je vous ai fait écrire une phrase aimable sur la page de garde de l'un de vos livres, et la comparaison de votre écriture avec celle de la lettre conservée par ma mère ne m'a laissé aucun doute. Je n'ai par contre jamais eu envie de nouer avec vous des liens qui ne pouvaient être qu'artificiels. Aujourd'hui encore, après avoir pénétré sous votre porche et tiré votre sonnette, je vais me sauver bien vite. Comme vous l'avez fait à l'époque, je pars chercher un autre avenir, quelque part dans le vaste monde.

     

    Le bébé sur lequel j'épingle cette lettre a deux mois, et elle s'appelle aussi Liberté.

     

    Avec mes vœux de bonheur les plus sincères pour vous et votre nouvelle petite fille.

     

                                                                        Liberté

     


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  • Aujourd’hui, j’ai reçu une lettre mêlée au courrier familial. L’enveloppe est jaunie, tirée sans doute d’un coffret d’un autre temps que j’imagine noué d’un ruban de satin. Je la crois arrivée par erreur, cependant elle porte bien mon nom et  mon adresse. Je la pose négligemment sur mon bureau,  je la lirai plus tard.

    « Mademoiselle,

    J’ai appris, il y a peu de temps, la vérité sur une  douloureuse mésaventure dont j’ai été victime il y a quelques années.

     J’ai accusé à tort ma petite fille qui jouait avec vous un jour d’été dans notre jardin du Paradou. Mes relations avec celle-ci en ont été altérées et je me dois maintenant de reconquérir sa confiance et son affection.

     J’étais déjà, à cette époque-là, une femme blessée par une vie difficile. C’est vrai que je n’apportais pas grand soin à mes affaires, les laissant traîner facilement. Mais un objet auquel je tenais particulièrement  m’apportait un peu de plaisir, cela vous fera peut-être sourire, il s’agit d’une tabatière.

    C’était un héritage de ma grand-mère ; cet objet en or, finement ciselé ne me quittait jamais, - oui, je prisai - ! C’était un moment de fantaisie dans ma vie exempte de distractions ; ce jour-là, j’ai eu la mauvaise idée de le poser sur le rebord d’une fenêtre et depuis,  je l’ai  cherché en vain  et ne l’ai jamais retrouvé. Je sais maintenant que c’est vous qui m’avez dérobé ce que j’appelais « mon bijou ». Une personne dont la bonne foi ne fait aucun doute m’a certifié  vous avoir vue perpétrer ce larcin .

    Avez-vous conscience du tort que vous m’avez fait et me faites encore aujourd’hui ? Je vous laisse à vos remords et à vos regrets. »

    Ce méfait est exact. Je n’ai jamais rendu cet objet à cette vieille dame. J’en suis très affectée car je suis dans l’impossibilité de réparer cette  mauvaise action qui me laisse un goût amer.

     

    Bernadette  -  23 novembre 2013

     

     


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